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Reprendre la Parole !

Patriote ALGERIEN démocrate et laïc, Républicain attaché au progrès et à la justice sociale. Farouchement jaloux de ses droits et pleinement engagé pour leur défense.

Rupture un texte de Abderrahmane Chergou

Il existe des mots qui nous font peur et qui, pourtant, sont au cœur de tous nos discours, de tous nos écrits. La vie est en perpétuel mouvement. Cela implique, naturellement, la négation de toute forme de stagnation et de sur6place. A La base du mouvement dialectique, il y a cette remise en cause incessante, ce « doute scientifique » qui font bouger les choses et les pousses en avant. Qu'est-ce que « la négation de la négation » sinon cette rupture à un moment donné avec une situation et le passage à une autre, qualitativement nouvelle C'est pour avoir « oublié » cet abc de la vie que nous sommes parfois réveillés brutalement, douloureusement, par une nature qui fait objectivement et inexorablement son travail.

 

Un de mes professeurs en sciences naturelles au lycée nous donnait une définition vivante et extraordinairement juste de la marche de l'homme. « La marche, nous enseignait-il, est une succession de chutes évitées ». En effet, le pas lancé en avant s'accompagne d’un mouvement du corps dans la même direction jusqu'à ce que la projection du centre de gravité glisse au-delà « du polygone de sustentation » et de ce fait, se trouve en situation de déséquilibre. Si à ce moment précis, on ne fait pas un nouveau pas, déplaçant ainsi le « polygone de sustentation » « récupérant » le centre de la gravité du corps et bloquant du même coup la chute prévisible, on se retrouve inévitablement à terre. A chaque pas, il y a rupture de l'ancienne équilibre et réalisation d'un nouveau. Et ainsi de suite si l'on veut continuer à avancer

 

Ainsi la marche vers le progrès se fait par ruptures successives et le passage d'un ordre vers un autre de qualité supérieure. On ne peut admettre le caractère relatif de la vérité scientifique et dans le même temps s'efforcer de figer les choses qu'elles soient économiques, sociales, culturelles ou autres. Le progrès scientifique implique la rupture avec une vérité scientifique établie à un moment donné de l'histoire de l'humanité et la conquête de nouveaux de nouvelles découvertes.

 

La rupture est un phénomène objectif rendu nécessaire par le mouvement de la vie. Cela n'a aucun caractère « moral ». La rupture ne signifie pas « reniement » du passé au sens moral, mais plutôt son dépassement étant entendu qu'il ne saurait y avoir de situation nouvelle son point de départ. Dans le développement et les transformations de la société il est totalement inopportun d'introduire une quelconque « dramatique » dans le processus de dépassement. Mais si ce nécessaire dépassement n’est pas favorisé à temps, ou s'il est contrarié, cela crée un état de pourrissement qui rendra la rupture plus complexe, plus brutal et mois maîtrisable.

 

Lorsque, dans le processus de développement de la société, la vie nous fait découvrir des manquements aux principes élémentaires de la loi du mouvement, des pesanteurs freinant la résolution naturelle des contradictions ou des tendances à dévier des objectifs proclamés en fonction d'intérêts étroits, il faut avoir le courage de rompre avec des méthodes et des directions de travail nous tirant en arrière. Lorsque le diagnostic de la situation, qui doit être permanent, nous éclaire sur des erreurs, des sectarismes, des dogmatismes qui, tels des boulets aux pieds, nous empêchent de jouer pleinement notre rôle, il est vital, sous peine de mort plus ou moins lente, de se corriger et de se libérer des pesanteurs paralysantes.

 

Il n'existe plus de modèle du socialisme. Cela n'aurait jamais dû exister ! Tant il est vrai que, en partant d’idées universelles et de vérités scientifiques dynamiques, il revient aux citoyens de chaque pays de construire, selon leurs réalités propres, la société développée et de justice sociale souhaitée. Le « socialisme réel » à côté de réalisations incontestables, a élaboré des modèles, des dogmes en contradiction avec l’essence  profonde du socialisme en tant que mouvement social. Cette évolution a rendu difficile son enracinement dans les classes laborieuses dans notre pays. Il nous faut aujourd'hui, dans l'intérêt de l’avenir moderne progressiste de l'Algérie, procéder à une rupture d'avec les dogmes figés, des erreurs décelées, les boulets idéologiques politiques qui nous barrent la route de notre propre société. Ainsi nous renouerons avec le mouvement réel de l'histoire et les enseignements des théoriciens et des militants révolutionnaires.

 

Le socialisme démocratique et moderne se propose, dans notre pays de transformer la société algérienne en partant de ses réalités actuelles. Une de ses missions fondamentales du moment avec tous les partis et mouvements démocratiques, est de réaliser la rupture, sans concession aucune ni équivoque, avec la société pré-capitaliste et sa superstructure intégriste totalitaire.

Le passage irréversible à une société moderne, pluraliste, démocratique est une tache commune à tous les partis et mouvements se revendiquant et acceptant l’alternance.

 

Le socialisme moderne et démocratique, dans notre pays en cette fin de siècle, continue, en les dépassant les luttes nationales et sociales de dizaines d'années avant et après l'indépendance. Il constitue l'espoir pour des millions de citoyens. Mais pour gagner leur adhésion, il doit avoir le courage de faire son auto-critique sans concession et de rompre avec tout ce qui est mort est dépassé et avec ce qui n'aurait jamais dû exister.

Lorsqu'un être cher meurt, nous sommes contraints de rompre avec lui et de l'enterrer. Ce qui ne veut pas dire que nous cessons de l'aimer, de le respecter ni de profiter de son héritage positif matériel ou moral.

 

Abderrahmane Chergou

In Alger Républicain, le 01/09/1991

 

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